Accompagné de deux collègues, Markus Rufer fait un tour de contrôle dans le bâtiment du réacteur. Tous les trois doivent parler fort pour se comprendre: une scie à câble est en train de découper l’une des dernières briques de blindage, en bas du bâtiment du réacteur. Pendant les premières semaines du démantèlement, ces briques de recouvrement et de blindage, lourdes de plusieurs tonnes, ont été retirées de cette zone, mais aussi tout en haut du bâtiment du réacteur, avant d’être démontées, emballées et évacuées. Lorsque la centrale fonctionnait, elles constituaient l’une des nombreuses mesures de protection contre la radioactivité; désormais, elles ne sont plus nécessaires. Ce qui est nécessaire en revanche, c’est de l’espace pour la suite des travaux de démantèlement.
«De nombreux chantiers», au sens propre du terme
«Le démantèlement ressemble un peu à la révision annuelle, sauf qu’il s’agit maintenant de séparer les systèmes et composants, et non plus de les assembler», explique Markus Rufer, qui travaille à la CNM depuis déjà 27 ans. En tant que chef d’équipe du réacteur dans le génie mécanique, il a longtemps été responsable de la maintenance, ainsi que de l’ouverture et de la fermeture de la cuve de pression du réacteur notamment, avant de passer en 2017 au département Démantèlement en devenant responsable de projet Démontage.
Il est ravi de ce nouveau défi. Ici aussi, ses nombreuses années d’expérience sont un atout. N’est-ce pas un peu triste de démonter en pièces détachées l’installation qu’il a chérie et entretenue pendant toutes ces années? Markus Rufer est pragmatique: «Non. Le produit est juste devenu quelque chose d’autre. Nous avons investi beaucoup de temps dans la planification, et nous sommes ravis de pouvoir tout mettre en place.»
Prochaine étape: désassembler le couvercle du confinement primaire et du manteau d’isolation. Tous deux servent à refermer des récipients qui entourent le réacteur. Il s’agit également d’éléments qui protègent contre la radioactivité pendant le fonctionnement. Il faut également démonter les barres de commandes qui permettent de régler la puissance du réacteur ainsi que leurs organes de commande. Bientôt, Markus Rufer dirigera donc de nombreux chantiers, au sens propre du terme. Mais il échange régulièrement avec les professionnels sur place, ce qui lui permet de garder une vue d’ensemble.
Planification à la minute près
A l’heure actuelle, Markus Rufer se concentre principalement sur la planification, qui lui donne un peu de travail. Même si la CNM ne produit plus d’électricité depuis le 20 décembre 2019, il s’agit toujours d’une installation nucléaire. Les normes de sécurité sont donc extrêmement élevées. Chaque étape nécessite un certificat de travail, c’est à dire un «feu vert» permettant de réaliser les travaux concernés. Il est tout aussi important de s’accorder avec les collègues des différents départements au sein de la CNM, et avec des entreprises externes qui exécutent des tâches spéciales. Tout doit concorder pour le résultat final. «L’interaction de nombreux postes différents rend mon travail intéressant et varié», déclare Markus Rufer.
La planification précise des interventions fait également partie de ses tâches. Il calcule notamment le nombre de personnes nécessaires pour un travail, et la durée d’intervention possible de ces dernières. Il doit tenir compte de nombreux aspects: les travaux dans le bâtiment du réacteur impliquent un passage par plusieurs étapes, et de fréquents demi-tours. S’y ajoutent les défis habituels sur les chantiers de construction. Markus Rufer fait preuve d’une attention extrême pour le démontage et le désassemblage du manteau d’isolation: construit dans les années 60, il contient de l’amiante. Pour éviter la formation de poussière d’amiante, il faut le placer en dépression dans un boîtier. Le site est également équipé de douches afin que les collaborateurs n’emportent rien à l’extérieur. Tous ces équipements sont construits là où les grosses briques de blindage ont été découpées il y a peu.
Il y a encore beaucoup à faire
Après son tour du bâtiment du réacteur, Markus Rufer retourne à son bureau. La fenêtre de cette grande pièce donne directement sur l’Aar. «C’est précisément en ce moment, où mes journées de travail sont plutôt longues, que je suis content d’avoir une si belle vue», reconnaît Markus Rufer.
La phase actuelle est très intensive pour lui, mais les choses devraient se calmer un peu à partir de juin 2020. Mais avant cela, il faut réaliser les prochaines étapes de la planification. L’intérieur du réacteur doit être désassemblé. A quoi ressemblera la suite pour notre quinquagénaire, lorsque ces travaux seront eux aussi terminés? Il n’y pense pas encore: «Nous aurons encore beaucoup à faire et pendant longtemps à la CNM», déclare Markus Rufer. Et après, il faudra aussi démanteler les autres centrales nucléaires de Suisse à un moment ou l’autre. Mais jusque là, l’Aar aura tout le temps de suivre son cours sous les fenêtres de Markus Rufer.
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